Photo: Marine Nationale |
By Wording OD
Pas moins de 1200 personnes, parmi lesquelles de nombreux anciens
pilotes et techniciens, étaient réunis hier pour l’adieu aux armes du
Super Etendard. 42 ans après son premier vol, le vénérable avion de
combat de la marine française a été officiellement retiré du service
lors d’une cérémonie sur la base d’aéronautique navale de Landivisiau,
où il ne restait plus que 5 avions encore opérationnels au sein de la
flottille 17F. Après un ultime catapultage le 16 mars depuis le
porte-avions Charles de Gaulle, avec lequel ils ont effectué leur
dernière mission l’hiver dernier, bombardant notamment les positions de
Daech en Irak et en Syrie, les Super Etendard de la « Glorieuse » 17F
sont remplacés par des Rafale Marine. Ceux-ci avaient déjà succédé à
leur illustre aîné au sein de la « Furieuse » 11F et équipent depuis
2001 et l’entrée en service du nouvel avion la flottille 12F.
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85 exemplaires produits par Dassault
Le Super
Etendard était opérationnel dans la Marine nationale depuis 1978, quatre
ans après son premier vol. Produit à 85 exemplaires par Dassault
Aviation, dont 14 pour l’Argentine, l’avion a été au fil du temps
profondément rénové, d’où sa dernière appellation de SEM (Super Etendard
Modernisé). Car, au-delà de la carlingue, énormément de choses avaient
évolué depuis la version originale, nommée SUE. Le cinquième et dernier
standard, adopté par 35 avions, date de 2006. Ces appareils
mono-réacteur, équipés d’un moteur SNECMA 8K50 de 5 tonnes de poussée,
pouvaient atteindre Mach 1.3. Ils appontaient au moyen d’une crosse et
étaient catapultés par élingue et non par le train avant, comme c’est le
cas aujourd’hui avec les Rafale. « C’était un avion couteau suisse,
très polyvalent et taillé pour le porte-avions. On le trouve attachant
car il est robuste et rustique », raconte avec passion le commandant de
la flottille 17 F. « Le cockpit est très étroit, ce qui donne au pilote
l’impression de faire corps avec sa machine », ajoute le commandant de
la BAN de Landivisiau, qui a effectué son premier vol pour la Marine sur
cet appareil monoplace.
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« C’était l’ancienne école »
A côté de la
« Rolls » Rafale, le SEM était en effet rustique, bien moins confortable
que son successeur et forcément plus fatiguant pour les pilotes, qui
n’avaient pas toutes les assistances d’un appareil moderne. Pas de
commandes de vol électriques, ici on fonctionnait à l’hydraulique (les
avions de chasse français sont passés aux commandes électriques après le
Mirage F1CR). « C’était l’ancienne école, avec un pilotage à la main
classique, nous étions limités à 6 heures en temps de vol », sourit un
ancien pilote et commandant de la 17F, qui rappelle tout de même que le
vieux Super Etendard a aussi, en son temps, apporté de vraies avancées
technologiques : « Ce fut le premier avion français à avoir une centrale
à inertie et un viseur tête haute ». Très léger, puisque pesant à vide
moins de 7 tonnes pour une masse maximale de 11.9 tonnes (21 tonnes pour
le Rafale), le Super Etendard comptait deux points d’emport extérieurs,
deux points sous les ailes et un ventral. « L’autonomie était assez
limitée et nous utilisions souvent les points d’emport pour des bidons
de carburant supplémentaires ».
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Un grande polyvalence
Dès lors, il y avait
moins de capacités offensives mais le « couteau suisse » de
l’aéronautique navale française avait la particularité de pouvoir
emporter une palette incroyablement variée d’armements. « C’était un
bombardier léger extrêmement polyvalent, capable d’être mis en œuvre sur
porte-avions de jour comme de nuit et qui pouvait aussi bien mener des
assauts en mer que contre des objectifs terrestres. Il avait deux canons
de 30mm et pouvait emporter des roquettes, des bombes classiques ou à
guidage laser, un missile antinavire Exocet AM39 et même un armement
nucléaire, d’abord l’AN52 puis l’ASMP. Il avait également été adapté aux
missions de reconnaissance et pouvait, dans sa fonction nounou,
ravitailler en vol d’autres appareils ». Le SEM n’avait toutefois rien
d’un chasseur : « Ce n’était pas un intercepteur car nous n’avions pas
de postcombustion pour aller à toute vitesse à haute altitude. Mais
l’appareil pouvait emporter deux missiles air-air Magic 2 pour son
autodéfense ».
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Sur tous les fronts depuis quatre décennies
Tout
au long de sa carrière, et jusqu’à sa dernière année de service, le
Super Etendard aura rendu de fiers services et fut de la plupart des
grandes opérations militaires menées par la France au cours des quatre
dernières décennies. A bord des porte-avions Clémenceau et Foch, puis du
Charles de Gaulle, ces avions auront été engagés à de multiples
reprises. Ils réalisèrent notamment le raid de Baalbek, mené en novembre
1983 par 8 SUE partis du Clémenceau suite à l’attentat ayant provoqué
la mort de 58 militaires français à Beyrouth, au Liban. On les
retrouvera aussi en ex-Yougoslavie, ou encore en Afghanistan, y compris
pour des interventions menées depuis la base de Kandahar en 2008 lorsque
le Charles de Gaulle était immobilisé par son premier arrêt technique
majeur. En 2011, ils sont encore en première ligne lors de
l’intervention en Libye, puis contribuent à affaiblir le groupe
terroriste Daech, en Irak et en Syrie, lors de trois missions
successives menées en 2015 et 2016.
Quatre formations équipées, 14 avions perdus
En
tout, quatre unités de l’aéronautique navale furent équipées de Super
Etendard : les 11F (1978 à 2011), 14F (1979 à 1991) et 17F (1980 à
2016), ainsi que l’escadrille 59S (1991 à 1997) qui servait à formation
des pilotes de chasse.
Depuis 1978, 14 Super Etendard ont été
perdus accidentellement, dont 5 SEM, provoquant la mort en service de 8
pilotes et 2 techniciens.
Les SUE argentins
Alors qu’une quinzaine de
SEM étaient encore en parc début 2016, on ne connait pas encore leur
devenir. Certains termineront sans doute au musée ou comme pièce
d’exposition, d’autres serviront, comme c’est déjà le cas, à la
formation et l’entrainement au sol. Et puis il y a toujours la
possibilité d’une revente à l’Argentine, dernière utilisatrice de
l’avion. La marine de ce pays, qui rendit célèbre le Super Etendard dans
le monde entier pendant la guerre des Malouines (1982) suite à la
destruction du destroyer britannique HMS Sheffield, frappé par un
missile Exocet AM39 tiré par l’un de ses avions, dispose encore de 10
SUE. Des appareils au standard complètement dépassé mais dont les
cellules ont encore du potentiel. D’où l’idée de canibaliser à leur
profit les équipements plus modernes des anciens SEM français. Une
opération qui, si elle était décidée, serait évidemment plus lourde
qu’une simple acquisition de pièces détachées et demanderait l’aide
industrielle de Dassault.
Une quarantaine de Rafale pour assurer la relève
Pour ce qui est de la France, la relève est désormais assurée par les Rafale Marine, dont Dassault a récemment livré le 46ème
exemplaire. En tenant compte de l’attrition, avec quatre avions (M18,
M22, M24 et M25) accidentellement perdus entre 2009 et 2012, et la
remise en service des 10 premiers Rafale Marine, portés du standard F1
au standard F3, l’aéronautique navale devraient aligner 42 appareils en
2017.
Les deux derniers avions navalisés de la quatrième tranche
du programme Rafale, les M47 et M48, ne devraient pas être livrés avant
2020/2021, la priorité étant d’ici là donnée aux contrats à l’export. Et
pour le moment, ce sera tout puisqu’aucun Rafale M n’est, pour l’heure,
prévu dans la future tranche 5, normalement la dernière du programme.
Pas assez d’avions
Ce qui ne signifie pas
qu’il n’y aura pas d’autres avions de commandés à l’avenir pour la
flotte française. Car il parait évident que les effectifs seront trop
justes. Alors que chacune des trois flottilles doit aligner 12
appareils, soit 36 en tout, il faut en effet compter avec les périodes
de maintenance, l’attrition et bien entendu les besoins en formation et
entrainement. Trois Rafale Marine sont d’ailleurs mobilisés au profit de
l’escadron de transformation commun avec l'armée de l’Air implanté sur
la base de Saint-Dizier.
La marge de manœuvre est donc très faible
car le Charles de Gaulle, en cas de conflit de forte intensité, devrait
pouvoir embarquer plus de 30 appareils, ce qui ne laisserait quasiment
aucune réserve.
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